dimanche 4 juin 2017

GOOD MORNING BEAUCAIRE

Six ans aujourd'hui que je suis arrivée à Beaucaire pour envahir mes parents avec mes cartons et mes bestioles, le cœur plein d'espoir ! Comment aurais-je pu prévoir tout ce qui a suivi ? De la perte douloureuse de ma Maman un mois après mon arrivée, suivie un an après par celle de mon Papa, je garde un sentiment d'inachevé et une douleur qui ne me quittent jamais... Ma vie a été chamboulée bien au-delà de ce que j'en attendais, et pas du tout comme je l'envisageais. Mais de manière surprenante le bilan de ces six années est majoritairement positif, j'ai trouvé un équilibre, j'ai fait mon trou à Beaucaire et l'avenir s'annonce ensoleillé. 

Ne pas s'endormir sur mes acquis est ce à quoi je m'attache désormais, aller de l'avant et donner du sens à ma vie en renforçant mon engagement dans la lutte antiraciste et contre les extrémismes, quels qu'ils soient. Tout particulièrement contre l'extrême-droite qui gangrène la ville que mon cœur a choisi ! Souvent l’on me demande ce que cet engagement m'apporte, la question me surprend tant la réponse est évidente. C’est un formidable enrichissement personnel, la certitude de faire ce qui doit être fait, celle que le silence est pire que la mort. Oui c'est un engagement risqué, j'en subis les effets négatifs chaque jour, la haine et la violence sont omniprésentes dans ma vie, virtuellement comme dans la réalité. Mais elles me confortent dans ce que j’entreprends, et la satisfaction que je retire de la moindre action engagée pour mettre un terme aux dérives de l’extrême-droite est immense. 

Enfant déjà je ne supportais pas l’injustice, et il n’y a pas pire injustice que la haine de l’autre et la discrimination, avec tout ce que cela entraîne. Au fil des années et de mon histoire familiale j’ai acquis cette certitude que le Mal est sur cette terre, parmi nous. Il porte un nom, le fascisme. Et il avance à visage découvert, avec arrogance et trop peu de monde prêt à se lever pour lui barrer la route ! Les belles paroles et les promesses faciles, le discours populiste qui joue sur les ressorts de la peur et de l’envie, sont son pain quotidien. Celui qu’il jette en pâture à qui veut bien ouvrir la bouche pour avaler sans discuter. Tout cela est bien peu chrétien pour ceux qui se prétendent les champions de la morale et de la préservation de “nos traditions judéo-chrétiennes”. Mais ils ne sont pas à une contradiction près, et le pire est que leurs soutiens ne remettent jamais en question ces contradictions ! Dans ces conditions comment ne pas se lever pour dire “ASSEZ” ? J’avoue ne pas comprendre ceux qui regardent passer les trains en attendant que d’autres les fassent dérailler... Leur immobilisme est impardonnable.

Je ne suis pourtant pas de ces personnes qui aiment tout le monde avec des étoiles dans les yeux et la bouche en cœur, j’ai conscience des difficultés qu’entraîne la vie en société de communautés aux us et coutumes très différents les uns des autres. Se rapprocher de l’autre, apprendre à le connaître, dialoguer, sont les seules façons possibles de vivre ensemble. Pas un vivre ensemble idéalisé qui n’existe que dans l’esprit de ceux qui ne le vivent pas au jour le jour, mais un vivre ensemble tolérant, semé d’embûches et enrichissant. Celui que chacun de nous peut vivre, à Beaucaire et ailleurs, pour peu qu’il s’en donne la peine. 

J'ai transmis à ma fille et ma petite-fille les valeurs que je défends, je sais qu'elles veilleront à les transmettre à leur tour. A moi de leur prouver chaque jour qu'elles sont sur le bon chemin, celui sur lequel ont marché mes parents toute leur vie <3 Le chemin de l'amour, de la fraternité, de la solidarité, du partage et de la tolérance... Tous ces petits et gros cailloux qui vous écorchent les pieds mais qui vous ancrent dans l'humanité.

Ecrit à Beaucaire
le 31 mai 2017

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