Je n’ai aucune intention de faire ici un énième débat sur les mérites comparés des trois religions monothéistes, du bouddhisme, du paganisme et des autres croyances, c’est un sujet trop galvaudé et dont en vérité je ne me soucie guère. La question n’est pas de savoir si l’une ou l’autre apporte plus ou moins à l’enfant pour lequel les parents font un choix qu’il sera en grande majorité amené à suivre, pas plus n’est-il important de soutenir que faire le choix d’une religion peut lui être nuisible en lui imposant une morale et des critères de vie qui l’enfermeront dans un carcan dont il n’aura pas voulu. Non, il est clair que l’on fait des choix pour ses enfants par amour – amour des siens, amour de la croyance ou non croyance que l’on a choisi – ou simplement pour perpétuer des traditions familiales. Mais inutile de se leurrer ! Faire le choix d’élever ses enfants dans une religion pour perpétuer sa foi, ses traditions et les valeurs morales qui s’y rattachent, ou tout au contraire décider de n’en rien faire et de lui inculquer des valeurs tout aussi morales, mais solidement ancrées dans la laïcité et parfois dans le paganisme, est de toutes façons profondément égoïste. Car nous emmenons nos enfants sur la route que nous pensons sincèrement être la meilleure pour eux sans avoir aucune certitude qu’elle leur convienne, nous savons seulement qu’elle nous a permis de nous construire et de devenir adultes et nous espérons qu’il en sera de même pour eux.
Là
est le carcan, celui qui vous étouffe s’il n’est pas taillé à vos mesures, car
toutes les traditions ne sont pas bonnes à suivre et se plier à les suivre
aveuglément peut vous rendre la vie haïssable. Les règles de la vie en société
nous obligent à respecter la plupart d’entre elles, mais je considère pour ma
part que beaucoup d’entre elles gagneraient à être allégées, revues et
corrigées dans un esprit de modernité. S’il est essentiel de revaloriser des
valeurs telles que le respect, la tolérance, la générosité, et bien entendu le
civisme, le reste semble inadapté à la vie actuelle. La politesse oui, mais pas
les ronds de jambes car nous sommes tous sur un pied d’égalité ! Le
respect certes, mais pas la servilité qui rôde toujours et qui conditionne les
faits et gestes de nombreuses personnes craignant pour leur avenir d’exprimer
purement et simplement leurs opinions et de faire valoir leurs idées. Ménager
la chèvre et le chou, disait-on dans ma famille… Cela est juste dans le
principe mais dangereux dans la réalité, car à trop ménager on finit par perdre
de vue ses objectifs premiers. Ne plus me soucier de ménager qui que ce soit
qui n’en vaille vraiment la peine m’a valu une réputation de « grande
gueule » fort utile pour régler certaines questions épineuses et m’imposer
dans les occasions les plus diverses.
Il
m’a fallu devenir mature pour affirmer mes choix et ma vraie personnalité – lesquels
ont déconcerté sinon déplu – et pour faire le tri entre croyances, traditions
et réalité de mes besoins. Or ceux-ci me portent vers le paganisme ce qui n’est
guère évident à vivre dans notre société pragmatique et individualiste.
Déclarer à l’envie que l’on souhaite vivre en contact étroit avec la nature, en
respecter le rythme et croire en la toute puissance de l’univers n’est pas du
goût de tout le monde. Célébrer le rythme des saisons ainsi
que les cycles lunaires et solaires n’apporte certes aucune gloire ni renommée,
mais tellement plus de satisfactions que rien ne saurait égaler !
Parler
de pratiques de sorcellerie en fera sans doute frémir plus d’un, pour beaucoup
ce sera le rejet pur et simple, pour d’autres l’effroi ancré par des siècles de
superstition, nombreux seront ceux qui riront, qui railleront ce qu’ils ne
connaissent pas… Pourtant je vous l’affirme, la sorcellerie et la magie ne sont
que des pratiques mettant en œuvre les ressources de la nature et celles de
notre psychisme, rien de terrifiant ni de surnaturel là-dedans ! Étroitement liées au paganisme, dépendantes des cycles de l’univers tout
entier, elles ont toujours existé et ne disparaîtront jamais quoique l’on tente
dans ce sens. Des dons se transmettent, d’autres se découvrent, c’est un talent
comme un autre qu’il faut savoir affirmer sans honte et sans crainte. Rien à
voir avec les séries télévisées dont on nous bombarde et qui ont leur charme
mais ne sont pas ancrées dans la réalité, non ce sont des pratiques qui
viennent en aide à chaque instant de la vie qui le requiert, sans rien attendre
en échange.
Quel
est le pays qui ne compte pas dans ses légendes et ses contes transmis à chaque
génération depuis l’aube des temps quelques mages et sorcières, quelques fées
bienfaisantes, quelques lutins farceurs ? Et de nos traditions modernes
combien sont issues de la sorcellerie et du paganisme ? La plupart d’entre
elles. Inutile de se voiler la face, la sorcellerie existe, la magie est en toute
chose, et près de vous peut fort bien vivre quelque sorcière ou quelque
magicien. Sorcellerie ! De tout temps ce mot a fait peur… On a parlé de
superstitions campagnardes, de croyances dues à l’illettrisme, et bien entendu l’Eglise
s’est empressée d’y voir l’œuvre du Diable et d’œuvrer pour amoindrir le
pouvoir que lesdits sorciers avaient sur les populations. Jouant de
l’obscurantisme des paysans la toute puissante Eglise Catholique a semé la
terreur, et consolidé son assise sans s’émouvoir outre mesure de bâtir sur des
cendres… Les ignorants ne sont pas ceux que l’on a accusé – et que l’on accuse
encore – bien au contraire ce sont les accusateurs qui se sont rendus coupables
de crimes à l’envie en prétextant faire œuvre de charité ! Combien
d’hommes et de femmes sont morts dans d’atroces souffrances pour avoir mis en
pratique leurs croyances et leurs dons dans le seul but de faire le
bien ? L’Histoire retient leur martyre mais ne fustige pas les coupables,
ceux qui les ont jugés et les ont bel et bien assassinés. Pourquoi ? Parce
que ces pratiques font voler en éclat des idées reçues, parce que la différence
suscite la crainte, et que la crainte aidée bien souvent de la bêtise mène à la
méchanceté… De la méchanceté au crime il n’y a qu’un tout petit pas. Retenons
au passage que le christianisme est de toutes les religions monothéistes la
seule à avoir tenté l’éradication des adeptes du paganisme et de la
sorcellerie, la seule à craindre depuis toujours la menace qu’ils
représentent ! Nous savons, et l’Eglise sait, combien sont fragiles et
mensongers les piliers de son édifice…
Je revendique aujourd'hui ce que je suis, ce que je fais et ce en quoi je
crois, haut et fort et sans crainte aucune, sans me soucier de ce que l’on
pensera. Sans doute rira-t-on de moi, cela est même probable mais j’y suis
habituée, les rires et les moqueries sont le lot de ceux qui sont différents et
n’obtiennent pas longtemps l’effet recherché, un jour ou l’autre ils permettent
de s’assumer et de s’affirmer différent. Si j’en ai souffert un temps
relativement bref cela m’est égal aujourd'hui, car le rire d’un sot est vite
oublié et l’on n’en retient que
l’affirmation de ce que l’on est intrinsèquement. Cela seul est important.
Loin
de moi l’idée de rejeter en bloc les diverses croyances que se partagent les
peuples de cette planète, la liberté réelle est celle de choisir un guide ou de
n’en vouloir aucun, et personne ne devrait s’arroger le droit d’en décider pour
d’autres. Il n’est de pire aliénation que celle d’une soumission non consentie,
en aucun cas elle ne saurait être prise pour un consentement, encore moins pour
un don de soi mûrement réfléchi ! Non, le choix ou le rejet d’une croyance
doit se faire avec simplicité, avec évidence, après une réflexion profondément
intime et dont la durée dépendra de chacun… La mienne a duré dix ans, c’est
tout dire !
Ecrit à Paris,
le 15 février 2003
Ecrit à Paris,
le 15 février 2003
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